Phénoménologie et art. Le langage de l’art et de l’énergie créatrice

Phénoménologie et art. Le langage de l’art et de l’énergie créatrice


Apostolos Apostolou

Tout portrait qu’on peint avec âme est un portrait, non du modèle, mais de l’artiste

( Oscar Wilde)


Il y a une analyse phénoménologique de la notion du réel et du phénomène de la langue ? Phénoménologie rejetée de réalisme naïf et thèse dogmatique d’un monde de représentations toutes faites et pose que le réel est connaissable en tant qu’effet d’un processus psychophysique.

La langue est une forme de mouvement expressif, un geste phonétique; son essence réside dans ce qu’elle est à la fois sensible et compréhensible par l’intelligence d’autrui. La langue forma le réel; elle objectivise les événements intérieurs toujours changeants et rend l’homme capable de dominer le monde par l’esprit. La langue ne signifie pas un étant elle constitue elle-même un être. Cet être, tout en nous permettant de nous libérer de simples impressions, appauvrit la psychique, en imposant a l’esprit des limites : la langue est à la fois conquête de l’homme et sacrifice de son trésor émotionnel.

Non seulement la langue, mais aussi le sentir, le représenter, le penserons astreints a la limitation quant a l’acquisition d’une image complète d’un objet sensible de la conscience.
Comment la pensée de Heidegger entre-t-elle en dialogue avec l’art, et qu’est-ce que l’expérience phénoménologique des œuvres d’art a ouvert comme horizons nouveaux à cette pensée philosophique ?

Telles sont les directions principales de ce numéro consacré à «Heidegger et la phénoménologie de l’art ». Après deux brefs textes inédits en français, où on voit Heidegger s’entretenir sur l’art moderne et l’art d’Extrême-Orient, les diverses contributions ici rassemblées s’organisent autour de plusieurs axes, qui demeurent comme autant de questions : quelle est l’originalité du regard phénoménologique qui ne se présente pas comme une théorie de l’art, mais comme une expérience des œuvres qui engage le sens de l’habitation humaine ?

En quoi ce regard non métaphysique, qui se fraye hors de la réflexion esthétique sur l’art, ouvre-t-il des pistes pour une histoire poétique de l’art, où l’œuvre d’art n’est pas un objet mais le sujet d’une effraction qui implique le monde et l’existence ? Qu’est-ce que les «Cahiers» de Heidegger apportent comme éclairage quant à la situation de l’art pour notre temps ? Comment la rencontre avec des œuvres comme celles de Hölderlin, de Paul Klee et de sculpteurs contemporains de Heidegger a-t-elle travaillé sa pensée de l’intérieur pour lui permettre de parvenir tardivement à des formulations nouvelles au sujet de l’image et de l’espace notamment?

De manière générale, ces questions aspirent à faire dialoguer l’art et la philosophie en tant que chemins pour une expérience pensante, phénoménale et poétique du monde. (Heidegger et la phénoménologie de l’art. Guillaume Fagniez et Hadrien France-Lanord.)
À son avis CAROLINE ANTHÉRIEU-YAGBASAN: (Une histoire de l’esthétique au prisme de la phénoménologie) «L’art est une expérience de voyant‑vu: «L’intentionnalité inverse: être regardé par les choses, est donc chez Merleau‑Ponty l’origine de la peinture6 ». Il y a réversibilité entre le vu et le voyant. Sens du désir (Merleau‑Ponty), seule faculté spatiale – en rapport non avec des événements mais des objets –, sens de la volonté libre (car je peux fermer les yeux), mais également qui suscite l’idée d’infini par la distance dont elle a besoin (Jonas), la vue semble être le sens privilégié dans ces différentes analyses. Dans son chapitre sur Derrida, Escoubas fait également remarquer que tous les sens s’exercent dans l’intérêt de la vue. Faisons ici une parenthèse pour remarquer toutefois que la notion de phénomène, centrale en phénoménologie, n’est pas seulement de l’ordre du visuel, mais de toutes les formes du sentir…

En parallèle, et de manière tout à fait logique, la peinture se trouve le média privilégié, analysé par la plupart des philosophes, de Goethe et sa théorie des couleurs à Merleau‑Ponty évoquant Cézanne, ou encore Biemer et Picasso, mais aussi Derrida et les autoportraits de peintres. Seuls quelques chapitres traitent de la fiction, et la sculpture n’est évoquée qu’en passant. On en profitera pour faire remarquer ici que la plupart des théories esthétiques, y compris celles qui élaborent un système (pensons à Fiedler) ont du mal à s’extraire d’une tendance à favoriser un art sur les autres, ou du moins à en faire leur point de départ».


L’analyse de la formation de l’objet sensible est basée sur l’étament de l’ acte de voir. L’acte de voir est en connexion avec nos propres besoins et nos dispositions individuelles. Le sensible, en lui-même, n’est point une forme achevée; il reste inachevé et fragmentaire. L’analyse de la création des arts plastiques prend son point de départ dans la constatation selon laquelle la perception du monde extérieur par les organes de la vue permet de développer la matière visible en forme achevée. L’analyse qui suit est reprise de la problématique de la relation de l’art avec la nature.

L’art n’est pas directement naturel; en revanche, il est naturel pour l’Homme de produire de l’art et de l’apprécier, car cette faculté créatrice fait pleinement partie de sa nature, de son humanité. L’art n’est pas la nature, il est sublimation de la nature, expression du Beau et fonction autonome de l’esprit. Platon, dans Le Banquet, montre que les poètes travestissent le réel. L’art comprend une partie d’imitation, mimesis en grec. Pourtant, Aristote, qui part des mêmes concepts fondateurs de la définition de l’art (praxis, mimesis) montre que cette imitation, au contraire, rapproche du monde. En termes nietzschéens, nous dirons que l’esthétique platonicienne est l’esthétique du spectateur (aux yeux duquel l’original vaut toujours mieux que la copie), tandis que l’esthétique aristotélicienne est l’esthétique du créateur, c’est-à-dire du poète, au sens où les Grecs entendaient ce mot. Pour Merleau-Ponty, dans une autre mesure, les artistes sont ceux qui, par leur capacité à reproduire la perception brute, donnent la vision la plus proche de l’être, mais aussi du monde extérieur dont la nature fait partie.

C’est pourquoi, tout compte fait, l’authentique compréhensions d’une œuvre artistique n’est que l’apanage de l’artiste.


Apostolos Apostolou Professeur de philosophie,projet de racines correspondant à Athènes en Grèce

Redazione Radici

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